Il y a ce moment. Juste après l’amour. Tout a l’air calme en apparence : les corps s’apaisent, la respiration ralentit, la sueur sèche en silence. Mais à l’intérieur, chez certains hommes, quelque chose vrille. Comme un vertige, une boule au ventre, un coup de blues sans raison apparente. Si tu t’es déjà senti bizarre, même un peu vide, triste ou irritable après un rapport sexuel, tu n’es pas seul. Ce phénomène a un nom : la dysphorie post-coïtale.

Et non, ce n’est pas un délire new age ou une dépression camouflée. C’est réel, c’est mal compris, et surtout, c’est bien plus fréquent qu’on ne l’imagine.

Mais c’est quoi exactement, la dysphorie post-coïtale ?

La dysphorie post-coïtale (ou DPC pour les intimes), c’est ce mal-être émotionnel qui survient juste après un rapport sexuel consenti, souvent sans cause apparente. Elle peut se manifester par :

  • Un sentiment de tristesse ou de vide
  • Des pleurs (oui, même chez les mecs)
  • De l’irritabilité soudaine
  • Un sentiment de gêne, de honte ou de dégoût de soi
  • Un besoin impérieux de s’éloigner, voire de fuir
  • Ce trouble est plus souvent évoqué chez les femmes – et encore, timidement – mais il touche aussi de nombreux hommes. Le problème ? Peu osent en parler. Question d’éducation, de tabou social ou de peur de passer pour “bizarre”.

    Ce n’est pas de la science-fiction, c’est de la neurochimie

    Après l’orgasme, le cerveau libère tout un cocktail de substances : dopamine, ocytocine, prolactine… Autrement dit, un shoot hormonal qui varie d’un individu à l’autre. Et parfois, cette descente hormonale provoque une sorte de crash émotionnel. Le coup de blues biochimique, en quelque sorte.

    Mais il n’y a pas que le corps qui parle. Derrière ce mal-être post-coïtal, il y a aussi des couches profondes : psychologiques, émotionnelles, et parfois même existentielles. En gros, ça secoue nos tripes bien plus que notre chimie cérébrale.

    Pourquoi certains hommes sont-ils plus sensibles à la DPC ?

    Il n’y a pas de profil type, mais plusieurs facteurs semblent jouer un rôle :

  • Un passé émotionnel ou sexuel douloureux
  • Des traumas liés à l’intimité ou au corps
  • Une difficulté à gérer les émotions vulnérables
  • Un conditionnement masculin toxique : « un homme, ça jouit et ça passe à autre chose »
  • Et si tu penses que ça ne t’est jamais arrivé, peut-être que tu n’as juste pas mis de mots dessus. Parce que la tristesse ou la gêne, ça peut se camoufler à merveille derrière un “je vais fumer une clope” ou un scroll frénétique sur Instagram.

    Une histoire parmi d’autres : Maxime, 34 ans

    Maxime, c’est un pote rencontré lors d’un trek au Népal. Tranquille, posé, un mec bien dans ses baskets, du moins en apparence. Un soir autour d’un feu, il me balance entre deux gorgées de rhum local :

    “Tu sais, moi, après le sexe, j’ai la gorge serrée. J’ai envie de pleurer. C’est pas systématique, mais c’est là. Et j’ai toujours pensé que j’étais juste un peu dérangé.”

    Rien de “dérangé” là-dedans. Juste un truc dont personne ne parle. Après cette confidence, on a creusé. Et Maxime s’est rendu compte que ça datait de sa première relation, avec une fille toxique qui le faisait culpabiliser après chaque rapport. Résultat : même des années plus tard, son corps et son cerveau se souviennent.

    Comment gérer la dysphorie post-coïtale ?

    On ne va pas se mentir, il n’y a pas de solution miracle. Mais il y a des leviers. Voici quelques pistes pour apprivoiser ce moment délicat :

    1. Reconnaître le phénomène

    La première étape, c’est de mettre un nom sur ce que tu ressens. Non, tu n’es pas fou. Et non, tu n’es pas fragile. Tu vis simplement un phénomène que d’autres traversent aussi. Poser des mots dessus, c’est déjà se libérer un peu.

    2. En parler (à la bonne personne)

    Si tu es en couple, ose en parler à ta partenaire. Pas pour lui faire porter la responsabilité, mais pour qu’elle comprenne ce qui se passe. Exprime ce que tu ressens, sans filtre. Tu seras peut-être surpris par sa réaction : la vulnérabilité, c’est souvent beaucoup plus sexy que l’indifférence.

    Et si tu n’es pas à l’aise d’en parler à quelqu’un sur le moment, écris-le. Un petit carnet, une note vocale, une appli de journal intime (type Jour). L’idée, c’est d’externaliser ce que tu ressens, pas de le laisser moisir dans un coin de ton cerveau.

    3. Prends soin de ton corps (et de ton mental)

    Évite le réflexe “je me casse prendre une douche froide et j’oublie”. Prends le temps de rester là, avec toi. Respire. Bois un verre d’eau. Mets une playlist cool (perso j’ai un faible pour celle-ci quand je veux replonger en douceur).

    Et si la tristesse persiste, n’hésite pas à consulter un psy. Oui, ça peut sembler disproportionné pour ce genre de sensation passagère, mais crois-moi, c’est souvent la porte vers des révélations puissantes sur soi.

    Et si on repensait la sexualité autrement ?

    La DPC, au final, c’est aussi le révélateur d’un truc plus vaste : la façon dont on vit notre sexualité. Trop souvent, on court vers la performance, le nombre, l’intensité, sans prendre le temps de sentir ce qui se joue vraiment sous la ceinture et entre les oreilles.

    Et si on apprenait à ralentir ? À écouter nos émotions, nos sensations, nos inconforts aussi. La sexualité, c’est pas un sport de compétition. C’est un terrain de jeu intime, sensible, vibrant. Et parfois, ça fait remonter des vagues qu’on n’attendait pas.

    Quelques ressources pour aller plus loin

    Parce qu’il n’y a pas que Lucas Morel qui en parle (même si je le fais avec panache), voici quelques ressources utiles :

  • Étude sur la dysphorie post-coïtale chez les hommes – rédigée par des pros de la santé mentale, pour aller au fond des mécanismes
  • Sexologue.com – un bon point de départ si tu veux consulter ou poser des questions discrètement
  • PsychoActif – une communauté ouverte, où on parle des sujets sensibles sans langue de bois
  • Un dernier mot, entre nous

    Ce que tu ressens après l’amour ne définit pas ta masculinité. Être chamboulé, se sentir vulnérable ou triste, ce n’est pas un bug. C’est parfois la preuve que tu es vivant, connecté, sensible. Et si le sexe ne chasse pas tous les démons, il peut aussi révéler les coins d’ombre qui méritent un peu de lumière.

    Alors la prochaine fois que cette boule au ventre revient, ne lutte pas forcément. Observe-la. Aime-la, même. C’est peut-être le début d’un dialogue plus sincère avec toi-même.

    Et toi, tu l’as déjà ressenti ?

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